L’énergie du droit – numéro 40

La veille juridique de la Commission de régulation de l’énergie.

Dans un secteur en perpétuelle évolution, s’informer et décrypter l’actualité juridique nécessite beaucoup d’énergie. C’est pourquoi nous vous proposons, chaque mois, de vous donner accès à l’essentiel du droit de l’énergie et de la régulation. L’exercice n’est pas aisé et nous ne pourrons prétendre à l’exhaustivité. Mais nous espérons que vous trouverez cette veille utile !

En bref :

LES TEXTES COVID – Communication de la CRE relative aux effets de la crise sanitaire sur les opérateurs de réseaux Décret portant sur la réduction du tarif d’utilisation du réseau public de transport accordée aux sites fortement consommateurs d’électricité
LE JUGE Cour administrative d’appel de Douai – Annulation de la 2ème période de l’appel d’offres éolien terrestre
L’EUROPE Publication du rapport du CEER relatif à l’indépendance des autorités de régulation nationales CJUE – Examen de la réduction des incitations à la production d’énergie solaire en Italie et conformité au droit européen
LA REGULATION La CNMC condamne la société Rock Trading World à payer une amende de 60 000 € pour avoir manipulé le marché du gaz espagnol
ET AUSSI… Publication du « Global Energy Review 2021 » de l’Agence internationale de l’énergie

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LES TEXTES

Décrets

Réduction du tarif d’utilisation du réseau public de transport accordée aux sites fortement consommateurs d’électricité

Un décret du 10 avril 2021 modifiant la partie réglementaire du code de l’énergie simplifie le dispositif d’abattement du TURPE en vigueur pour les électro-intensifs. Les différents niveaux d’électro-intensivité sont supprimés et l’ensemble des bénéficiaires, hors sites de stockage, seront désormais assujettis à l’élaboration d’un plan de performance énergétique. Par ailleurs, le texte introduit une modification du calcul des modalités d’application de la réduction sur le TURPE. Enfin, le décret introduit une condition supplémentaire pour qu’un site puisse bénéficier pleinement du taux de réduction de sa catégorie. La réduction sera accordée sous réserve d’assurer individuellement pour chaque site la couverture des coûts directement imputables à son utilisation du réseau

La CRE a émis un avis favorable sur ce projet de décret dans une délibération du 25 mars dernier.

Consulter le décret n° 2021-420 du 10 avril 2021

Consulter l’avis de la CRE du 25 mars 2021

Précision des critères permettant de distinguer les différentes catégories d’offres commerciales « vertes » dans le comparateur d’offres du médiateur national de l’énergie

Un décret du 14 avril 2021 relatif au comparateur d’offres du médiateur national de l’énergie précise les critères permettant de distinguer les différentes catégories d’offres commerciales « vertes ». Parmi les critères précisés, on retrouve notamment la part d’énergie produite à partir de sources renouvelables certifiées par des garanties d’origine, pour l’électricité, ou la part de biogaz certifiée par des garanties d’origine contenue dans l’offre commerciale, pour le gaz.  Ce décret entre en vigueur le 1er octobre 2021.

Consulter le décret n° 2021-438 du 14 avril 2021

Arrêtés

Publication de quatre arrêtés précisant les aides pour l’électrification rurale

Quatre arrêtés précisent les aides pour l’électrification rurale. Le premier arrêté en date du 13 avril 2021, pris en application du décret n° 2020-1561 du 10 décembre 2020 relatif aux aides pour l’électrification rurale, confirme que ces aides sont limitées aux projets d’installations de production d’électricité à partir de sources d’énergies renouvelables (ENR) dans les zones non interconnectées. Une telle mesure vise à réduire le recours aux énergies fossiles à moins de 5% de la production d’énergie annuelle de l’installation totale.

Le second arrêté, également du 13 avril 2021, fixe le taux de subventions à hauteur de 80 % pour les travaux relevant des sous-programmes permettant d’atteindre cet objectif de 5 %.

Le troisième arrêté du 13 avril 2021 précise la répartition des aides allouées aux gestionnaires de réseaux de distribution en 2021, soit 353,5 millions d’euros pour le programme principal et 6,5 millions d’euros pour le programme spécial.

Le quatrième arrêté, en date du 17 avril 2021, détaille les critères de sélection des projets candidats aux financements via la mesure « Amélioration de la résilience des réseaux électriques et transition énergétique en zone rurale » de la mission « Plan de relance ».

Consulter l’arrêté du 13 avril 2021 pris en application du décret n° 2020-1561 du 10 décembre 2020 relatif aux aides pour l’électrification rurale

Consulter l’arrêté du 13 avril 2021 instituant un barème national en application de l’article 3 du décret n° 2020-1561 du 10 décembre 2020 relatif aux aides pour l’électrification rurale

Consulter l’arrêté du 13 avril 2021 relatif à la répartition annuelle des montants d’aides pour l’année 2021 au bénéfice des autorités organisatrices de réseau de distribution d’énergie pour le financement des travaux d’électrification visés à l’article L. 322-6 du code de l’énergie

Consulter l’arrêté du 17 avril 2021 instituant des critères de sélection des projets susceptibles de bénéficier de financements au titre de la mesure « Amélioration de la résilience des réseaux électriques et transition énergétique en zone rurale » de la mission « Plan de relance » créée par la loi n° 2020-1721 du 29 décembre 2020 de finances pour 2021

Précision des modalités de prise en charge des coûts de raccordement des bornes de recharge de haute puissance par le TURPE

Un arrêté du 27 avril 2021 précise les modalités de prise en charge des coûts de raccordement des bornes de recharge de haute puissance par le TURPE et modifie l’arrêté du 12 mai 2020 (cf. L’Energie du droit n°29, mai 2020). La prise en charge par le TURPE à hauteur de 75 % est désormais possible jusqu’à 5 000 kVA pour les bornes situées sur des aires de routes expresses et d’autoroutes non précédemment équipées d’une infrastructure de plus de 60 kVA, contre 1 000 kVA actuellement. La CRE a émis un avis favorable sur ce projet d’arrêté dans une délibération du 18 mars dernier (cf. rubrique « Principales délibérations de la CRE »).

Consulter l’arrêté du 27 avril 2021

Principales délibérations de la CRE

COVID – Communication relative aux effets de la crise sanitaire sur les opérateurs de réseaux

Les opérateurs de réseaux et d’infrastructures régulés par la CRE ont montré une bonne capacité d’adaptation à la crise COVID leur permettant, malgré la perturbation de leurs activités, de maintenir un haut niveau de qualité de service et d’alimentation et de retrouver un niveau normal d’activité dès l’été pour la majorité d’entre eux.

Les effets de la crise signalés par les opérateurs consistent principalement en (i) une baisse des consommations et des souscriptions, (ii) un décalage de certains investissements ayant des impacts financiers mais également sur la qualité de service (par exemple délais de raccordement) et (iii) des impacts limités concernant les charges d’exploitation.

Le cadre de régulation tarifaire a protégé les opérateurs des conséquences financières de la crise. Le périmètre du compte de régulation des charges et des produits (CRCP) et son dimensionnement se sont avérés bien adaptés pour capter les autres impacts de cette crise. Dès lors, il n’est pas nécessaire de réviser les trajectoires tarifaires ou de modifier le cadre de régulation.

Toutefois, la crise sanitaire n’est pas terminée et il n’est pas exclu qu’elle ait des conséquences sur le long terme. La CRE s’assurera donc que le cadre tarifaire reste adapté dans la durée.

A court terme, la CRE estime en revanche qu’il convient d’ajuster le calcul de certains indicateurs de qualité de service relatifs à des interventions chez les clients (relève et pose de compteurs notamment), activités qui ont été suspendues totalement durant le premier confinement. La CRE procédera à ces ajustements dès les prochaines mises à jour tarifaires.

Consulter la délibération du 25 mars 2021  

Validation des investissements de distribution de GRDF associés au développement du biométhane

En application des articles D. 453-23 et D. 453-24 du code de l’énergie, les gestionnaires de réseaux de distribution (GRD) établissent un programme d’investissements de renforcement du réseau en vue de permettre l’augmentation des capacités d’accueil de biométhane qu’ils soumettent à la validation de la CRE.

La délibération 2020-261 de la CRE est venue préciser le dispositif de validation des investissements de renforcement des GRD en indiquant que ceux-ci feront l’objet d’une validation ex ante, à un rythme a minima semestriel et que cet exercice pourra dans un premier temps être mené plus fréquemment pour répondre aux besoins de la filière.

GRDF a soumis à la validation de la CRE un programme d’investissements prévisionnels de renforcement d’un montant de 27 M€, constitué de 51 ouvrages, permettant l’adaptation du réseau de distribution pour en augmenter les capacités d’accueil de biométhane.

La CRE valide 50 ouvrages pour un montant total de 25,5 M€. S’agissant du dernier ouvrage soumis par GRDF, la CRE relève qu’elle ne peut s’assurer de sa pertinence, et notamment de sa cohérence avec le projet de zonage de raccordement de la zone concernée non validé à ce stade. Par conséquent, cet ouvrage n’est pas validé. La CRE poursuivra ses échanges avec GRDF sur ce projet de zonage et demande à GRDF de lui soumettre une nouvelle demande de validation de l’investissement conforme à ce zonage lorsque celui-ci sera validé ou, le cas échéant, lorsque la participation de tiers aura été définie.

Consulter la délibération du 18 mars 2021

Adoption des procédures de repli en cas de défaillance du couplage de marché journalier pour les régions Europe du sud-ouest et Italie du nord

En application de l’article 44 du règlement CACM, RTE a saisi la CRE le 25 septembre 2020, pour approbation de propositions d’amendement des méthodologies relatives aux procédures de repli en cas de défaillance du couplage de marché journalier pour les régions de calcul de capacité :

  • « Europe du sud-ouest », comprenant l’Espagne, la France et le Portugal ; et
  • « Italie Nord », comprenant l’Autriche, la France, l’Italie et la Slovénie.

Les évolutions proposées visent principalement à décaler de 10 minutes l’heure limite de découplage total, l’établissant à 14h. Cette modification des procédures de repli en cas de défaillance du couplage de marché journalier assure la cohérence des règles visant des situations dégradées avec le processus opérationnel nominal de couplage journalier.

La CRE approuve les procédures de repli en cas de défaillance du couplage de marché journalier pour les régions Europe du Sud-ouest et Italie Nord, sur la base de la proposition d’amendement des GRT et incluant les modifications des autorités de régulation de la région, validées au moyen d’accords communs en date du 11 mars 2021 et 15 mars 2021 respectivement.

Consulter la délibération du 18 mars 2021  

TURPE – Publication de l’avis sur la prise en charge du raccordement aux réseaux publics d’électricité des infrastructures de recharge de véhicules électriques et hybrides

La CRE a été saisie par la Direction Générale de l’Energie et du Climat d’un projet d’arrêté modifiant l’arrêté du 12 mai 2020 relatif à la prise en charge par le TURPE du raccordement des infrastructures de recharge de véhicules électriques.

Le passage du seuil de puissance de raccordement éligible au taux de réfaction de 75 % de 1 000 kVA à 5 000 kVa se traduira nécessairement par une hausse des coûts pris en charge par le TURPE.

La CRE constate cependant que le dispositif de réfaction proposé reste limité dans le temps, jusqu’au 31 décembre 2021, et à des aires de service qui ne sont pas déjà équipées d’une IRVE ouverte au public. En outre, elle partage le choix fait de développer un réseau dense de stations de recharge rapide sur les aires de service des routes expresses et des autoroutes.

La CRE émet donc un avis favorable sur le projet d’arrêté tout en rappelant que le passage de 1 000 kVA à 5 000 kVA du seuil de puissance permettant de bénéficier d’un taux de réfaction à 75 % se traduira par une hausse des coûts pris en charge par le TURPE. L’arrêté correspondant a été publié le 27 avril 2021.

Consulter la délibération du 18 mars 2021

Consulter les autres délibérations de la CRE

LE JUGE

Conseil d’Etat

Incompétence du Conseil d’Etat pour connaître de la décision de l’Autorité de la concurrence de renvoyer une affaire à la Commission européenne

Les sociétés Illumina et Grail ont demandé au juge des référés du Conseil d’Etat d’ordonner la suspension de l’exécution de la décision de l’Autorité de la concurrence par laquelle elle a adressé à la Commission européenne, sur le fondement de l’article 22 du règlement (CE) n° 139/2004 du Conseil du 20 janvier 2004 relatif au contrôle des concentrations entre entreprises, une demande d’examen d’une opération d’acquisition.

Le Conseil d’Etat juge que, dès lors qu’une telle décision n’est pas détachable de la procédure d’examen de l’opération d’acquisition, menée par la Commission sous le contrôle de la Cour de justice de l’Union européenne, le juge administratif n’est pas compétent pour en connaître.

Consulter l’ordonnance du Conseil d’Etat du 1er avril 2021  

Construction du parc éolien Les Moulins du Lohan dans la forêt de Lanouée en Bretagne

Des associations ont formé un recours à l’encontre des permis de construire accordés à la société de projet Les Moulins du Lohan pour un parc éolien dans la forêt de Lanouée, de son autorisation d’exploitation et de la dérogation à l’interdiction d’affecter la conservation d’espèces accordée par le préfet du Morbihan.

Saisi d’un pourvoi à l’encontre de l’arrêt de la cour administrative d’appel de Nantes ayant rejeté les demandes des associations requérantes, le Conseil d’Etat confirme le projet de construction.

En particulier, le Conseil d’Etat relève le caractère fragile de l’approvisionnement électrique de la Bretagne et estime que, malgré son caractère privé, le parc éolien répond à une raison impérative d’intérêt public majeur.

Il confirme également qu’il n’existait pas d’autre solution satisfaisante pour ce projet, la forêt de Lanouée retenue permettant l’implantation d’un parc éolien à plus d’un kilomètre des habitations, situation particulièrement rare en Bretagne du fait de l’étalement de l’urbanisation et de son habitat dispersé. En outre, elle ne comporte ni zone Natura 2000, ni espace boisé classé, ni zones humides et dispose d’un réseau important de voies forestières et de capacités de raccordement.

Consulter les décisions du Conseil d’Etat 15 avril 2021 n°430497, n°430498 et n°430500

Cour administrative d’appel de Douai

Annulation de la deuxième période de l’appel d’offres éolien terrestre

Le 28 avril 2017, le ministère de la transition écologique et solidaire a publié un appel public à la concurrence pour la réalisation et l’exploitation d’installations éoliennes terrestres en France métropolitaine.

Par délibération du 12 juillet 2018, la CRE a procédé à l’examen des offres déposées et adopté une liste de quatre offres qu’elle proposait au ministre de retenir. La CRE a estimé que la pression concurrentielle sur les prix était insuffisante pour la deuxième période de l’appel d’offres et a recommandé au ministre de recourir à l’article 1.2.2 du cahier des charges en vertu duquel « les dossiers de candidatures retenus par le gouvernement pourront représenter moins que la puissance cumulée appelée », et de ne déclarer dès lors recevables que les quatre projets non éliminés, « dont le tarif de référence est inférieur à celui du dernier lauréat de la première période ».

Le ministre a saisi la CRE de son choix de retenir un dossier supplémentaire portant le nombre de lauréats à cinq pour une puissance totale de 118 MW, exposant que le choix d’un cinquième candidat était intervenu « au vu du contexte actuel de l’éolien terrestre, de la puissance dudit projet (35,4 MW) et de l’effort de baisse de tarif qu’il a entreprise entre la 1ère et la 2ème période ».

Le 27 août 2018, le ministre a informé les candidats du résultat de l’appel d’offres et notamment la société Enertrag de ce que son offre n’était pas retenue. Il a publié les résultats de l’appel d’offres le 6 septembre 2018.

Par délibération du 12 septembre 2018, la CRE a constaté que ce cinquième projet est « le renouvellement d’un parc qui n’aura été exploité que quinze années et dont les principaux éléments constitutifs […] devront être neufs ».

La société Enertrag a exercé un recours aux fins d’annuler la décision du ministre fixant la liste des lauréats pour la deuxième période de l’appel d’offres et d’enjoindre au ministre de reprendre l’instruction des offres.

La cour administrative d’appel de Douai accueille  la demande d’annulation au motif que le ministre s’est fondé sur des critères non prévus par le cahier des charges pour désigner les candidatures retenues lors de la deuxième période de l’appel d’offres.

En effet, la Cour rappelle notamment que le cahier des charges a fixé le prix comme unique critère de notation des offres et que les stipulations de l’article 1.2.2 ne l’autorisaient qu’à retenir des candidatures dont la puissance cumulée n’atteignait pas 500 MW, mais non à modifier les critères de sélection des candidatures.

Toutefois, la Cour rejette la demande d’injonction de la société Enertrag tendant à la réinstruction des offres déposées dans le cadre de la deuxième période de l’appel d’offres, les besoins en capacité de production d’énergie électrique ayant été satisfaits par les périodes de candidatures suivantes. La deuxième période de l’appel d’offres éolien terrestre n’est ainsi pas relancée.

Consulter la décision de la Cour d’appel de Douai du 30 mars 2021

Cour d’appel de Paris

Contentieux S3REnR – Nouveau sursis à statuer

A l’instar de l’affaire Poste de Cressy (cf. L’Energie du droit n°39, mars 2021), la cour d’appel de Paris décide de surseoir à statuer dans l’affaire Webgrid c. RTE.

La Cour constate que la décision objet du recours soulève des questions juridiques similaires à celles qui ont été tranchées dans l’affaire Pays de Montmédy Solaire 7, qui a fait l’objet de pourvois devant la Cour de cassation.

La Cour juge qu’il apparaît de bonne justice, afin d’éviter d’éventuelles contradictions dans l’interprétation des mêmes dispositions légales et réglementaires, de surseoir à statuer dans l’affaire Webgrid, jusqu’à ce que la Cour de cassation se soit prononcée sur les pourvois dans l’affaire Pays de Montmédy Solaire 7.

La Cour insiste sur la circonstance que « cette situation est d’autant plus nécessaire que le contentieux présente un caractère sériel », et qu’il apparaît dès lors nécessaire, dans un « souci de sécurité juridique » d’y procéder d’office.

Consulter la décision de la cour d’appel de Paris du 15 avril 2021

Comité de Règlement des Différends et des Sanctions (CoRDiS)

Incompétence du CoRDiS pour connaître d’un contrat conclu avec une société qui ne revêt pas la qualité d’opérateur d’ouvrages de transport de gaz

La société ConocoPhillips Skandinavia AS, expéditeur, a formé devant le CoRDiS une demande tendant, en substance, à ordonner le transfert au bénéfice des gestionnaires de réseaux de transport, d’un contrat initialement conclu avec la société GDF pour organiser le transit de quantités de gaz naturel entre les frontières françaises avec la Belgique et l’Espagne, et actuellement exécuté par la société Engie.

La société ConocoPhillips Skandinavia AS estimait que l’exécution de ce contrat par la société Engie violait l’obligation de transfert des droits et obligations attachés aux biens liés aux activités de transport, prévue par la loi du 9 août 2004 relative au service public de l’électricité et du gaz et aux entreprises électriques et gazières.

Le comité constate que la société Engie n’est pas responsable de l’exploitation, de la maintenance ou du développement du réseau de transport de gaz naturel. Ainsi, elle ne revêt pas la qualité de gestionnaire de réseau de transport au sens de la directive du 13 juillet 2009 et ne saurait, dès lors, être regardée comme un opérateur d’ouvrages de transport de gaz naturel au sens des dispositions de l’article L. 134-19 du code de l’énergie.

Le comité ajoute que la seule circonstance alléguée par la société ConocoPhillips, à la supposer établie, que la société Engie exécuterait matériellement un contrat de transport est sans incidence sur la compétence du comité. En conséquence, il se déclare incompétent pour connaître du différend.

Consulter la décision du CoRDiS du 1er avril 2021

L’EUROPE

Actualités de la Commission européenne

Publication de deux documents techniques de la Commission européenne relatifs au programme     « InvestEU »

Le 14 avril 2021, la Commission européenne a publié deux documents relatifs au programme « InvestEU » : une « communication concernant des orientations pour l’évaluation de la durabilité dans le cadre du Fonds InvestEU » ainsi que des « lignes directrices en matière d’investissement pour le Fonds InvestEU ». Le premier document a notamment pour objectif de préciser les conditions de réalisation des analyses de durabilité et d’inclusion des résultats dans l’évaluation économique du projet.

Pour rappel, la Commission européenne a publié le nouveau règlement (UE) 2021/523 établissant le programme d’investissement européen « InvestEU » le 26 mars dernier (cf. L’Energie du droit n° 39, mars 2021).

Consulter les documents techniques de la Commission européenne relatifs au programme InvestEU

Publication par la Commission européenne de l’acte délégué relatif au « Règlement taxonomie »

Le 21 avril, la Commission européenne a publié l’acte délégué relatif au règlement (UE) 2020/852 du 18 juin 2020 sur l’établissement d’un cadre visant à favoriser les investissements durables, dit « Règlement taxonomie », ainsi qu’une série d’annexes et de documents associés. Cet acte délégué inclut la bioénergie mais la Commission européenne indique que cette inclusion sera revue dans le cadre de la révision de la directive (UE) 2018/2001du 11 décembre 2018 relative à la promotion de l’utilisation de l’énergie produite à partir de sources renouvelables. Le texte vise également l’hydroélectricité, l’hydrogène ainsi que la conception de batteries et la distribution d’électricité. Les équipements électriques ne sont pour l’instant pas inclus mais pourrait l’être à la suite d’une révision du texte.

Concernant le nucléaire et le gaz, la Commission européenne fait le choix d’un acte délégué complémentaire adopté d’ici la fin de l’année. Par ailleurs, la Commission envisage également une législation spécifique pour le gaz ne répondant pas aux critères de la taxonomie, également d’ici la fin de l’année et parallèlement à la publication du « Paquet gaz décarboné ».

Par ailleurs, l’énergie nucléaire et le gaz ne sont pas couverts par cet acte délégué, un texte législatif pourrait être envisagé par la suite.

Consulter l’acte délégué relatif au Règlement (UE) 2020/852 du 18 juin 2020 sur l’établissement d’un cadre visant à favoriser les investissements durables (en anglais)

Actualités de l’ACER et du CEER

Publication du rapport du CEER relatif à l’indépendance des autorités de régulation nationales

Le 26 avril 2021, le CEER a publié son rapport relatif au suivi de l’indépendance des autorités de régulation nationales (ARN). Le rapport s’appuie sur les réponses transmises par 29 ARN. Quatre ans après la publication du précédent rapport, cette nouvelle édition dresse un état lieux de l’indépendance de ces ARN. Parmi les principales observations faites, le CEER indique que les pouvoirs et obligations des ARN dans d’autres secteurs que le gaz et l’électricité se sont considérablement accrus. En ce qui concerne l’indépendance en elle-même, un tiers des ARN a souligné un manque de ressources financières, ce qui interroge quant à leur indépendance.

Consulter le rapport 2021 du CEER relatif à l’indépendance des autorités de régulation nationales (en anglais)   

Publication d’une note du CEER relative à son approche pour une régulation plus dynamique

Le 8 avril 2021, le CEER a publié une note relative à son « Approche pour une régulation plus dynamique ». En effet, la régulation dynamique est l’un des trois éléments de la « stratégie 3D » du CEER, en plus de la décarbonation et de la digitalisation et vise à mettre en place des outils européens de régulation adaptés à un environnement en rapide mutation. Selon le CEER, il est nécessaire de développer des cadres réglementaires permettant de trouver un équilibre entre la réalisation des objectifs réglementaires et l’encouragement de l’innovation, notamment dans le secteur des énergies renouvelables. Cette note donne un aperçu de certains outils de régulation dynamique utilisés par les autorités de régulation nationale membres du CEER.  Parmi les exemples cités, on retrouve ceux des bacs à sable réglementaires ou des projets pilotes.

Consulter la note du CEER relative à son « Approche pour une régulation plus dynamique » (en anglais)

Publication d’une consultation publique de l’ACER sur la modification du règlement CACM relatif à l’allocation des capacités et la gestion de la congestion

L’ACER lance, du 15 avril au 10 juin 2021, une consultation publique relative à la modification du règlement (UE) 2015/1222 du 24 juillet 2015 établissant une ligne directrice relative à l’allocation de la capacité et la gestion de la congestion (règlement CACM).  En effet, l’ACER est chargée de remettre des recommandations à ce sujet à la Commission européenne d’ici l’automne 2021. Les modifications concernent la révision des tâches et de l’organisation des opérateurs de couplage du marché, le recouvrement des coûts et encore les mécanismes de couplage.

Consulter et répondre à la consultation publique de l’ACER relative à la modification du règlement CACM (en anglais)  

Publication d’une consultation publique de l’ACER en prévision de l’élaboration d’un code de réseau relatif à la cybersécurité

L’ACER ouvre du 30 avril au 29 juin 2021 une consultation publique dans le cadre de son projet d’orientations-cadres relatives à la cybersécurité des flux transfrontaliers d’électricité. Ces orientations-cadres non contraignantes auront pour vocation de définir des principes clairs et objectifs quant à l’élaboration d’un code de réseau sur la cybersécurité contribuant à maintenir la sécurité du système électrique à travers l’Europe.

Consulter et répondre à la consultation publique de l’ACER relatif au code de réseau « cybersécurité » (en anglais) 

Cour de Justice de l’Union Européenne (CJUE)

Annulation de la décision de la Commission autorisant le régime lituanien d’aide aux renouvelables

Par un arrêt du 14 avril 2021, le Tribunal de l’UE annule la décision de la Commission, du 8 janvier 2019 relative à l’aide d’État SA.45765 (2018/NN), concernant un régime d’aide mis en œuvre par la République de Lituanie au bénéfice des producteurs d’électricité à partir de sources d’énergie renouvelable.

Le Tribunal estime qu’il existe des indices révélateurs de doutes quant à la compatibilité du régime d’aide avec le marché intérieur que la Commission aurait dû éprouver (durée particulièrement longue de la procédure administrative, nombres d’échanges entre les services et les parties concernées, examen incomplet et insuffisant du cadre juridique national pertinent, des mesures de soutien aux producteurs, des exemptions au prélèvement…). Selon le Tribunal, ces indices tendent à démontrer que la Commission n’était pas en mesure de surmonter les difficultés sérieuses rencontrées lors de la procédure préliminaire d’examen de l’aide d’Etat litigieuse, justifiant dès lors l’ouverture d’une procédure formelle d’examen.

Consulter l’arrêt du TUE du 14 avril 2021

Examen de la réduction des incitations à la production d’énergie solaire en Italie et conformité au droit européen

Le gouvernement italien a prévu, dans un objectif de réduction des charges pesant sur les consommateurs, de nouvelles modalités de versement des tarifs d’incitation à la production d’électricité à partir d’installations photovoltaïques. Ces nouvelles modalités ont été appliquées à des situations contractuelles déjà constituées.

La CJUE a été saisie d’une question préjudicielle portant sur la conformité des dispositions de la loi italienne avec le droit de l’Union européenne, et notamment avec les principes généraux du droit de l’Union européenne de confiance légitime, de sécurité juridique, de coopération loyale et d’effet utile; avec les articles 16 et 17 de la Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne ; avec la directive 2009/28/CE et avec l’encadrement des régimes d’aide qu’elle prévoit ; avec l’article 216, paragraphe 2, du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne, notamment en relation avec le traité sur la Charte européenne de l’énergie.

La CJUE répond qu’en principe, le droit de l’Union ne s’oppose pas à ce qu’une réglementation nationale prévoit la réduction ou le report de paiement des incitations pour l’énergie produite par les installations solaires photovoltaïques accordées antérieurement par des décisions administratives et confirmées par des conventions ad hoc conclues entre les exploitants de ces installations et une société publique, lorsque cette réglementation concerne les incitations déjà prévues, mais non encore dues.

A cet égard, elle précise que les Etats membres disposent d’une marge d’appréciation quant aux mesures qu’ils estiment appropriées pour atteindre les objectifs contraignants nationaux de développement des énergies renouvelables et qu’ils sont libres d’adopter, de modifier ou de supprimer des régimes d’aide, pourvu notamment que ces objectifs soient atteints. Les Etats membres sont toutefois tenus de respecter les principes de sécurité juridique et de confiance légitime.

Bien que la Cour rappelle qu’il n’appartient qu’à la juridiction de renvoi de se prononcer sur la conformité d’une réglementation nationale aux principes de sécurité juridique et de protection de la confiance légitime, la Cour précise néanmoins qu’un opérateur économique prudent et avisé ne saurait se prévaloir d’une atteinte portée auxdits principes du fait des modifications apportées à cette réglementation, compte tenu du caractère public et précis des dispositions réglementaires en cause.

Consulter l’arrêt de la CJUE du 15 avril 2021

LA RÉGULATION

Actualités des autorités de régulation européennes

La CNMC condamne la société Rock Trading World à payer une amende de 60 000 € pour avoir manipulé le marché du gaz espagnol

Le 23 avril 2021, la Commission nationale espagnole des marchés et de la concurrence (CNMC) publie une décision par laquelle elle estime que la société Rock Trading World a manipulé le marché de gros du gaz espagnol, entre le 3 et le 7 novembre 2018, enfreignant ainsi les dispositions de l’article 5 du règlement REMIT. La CNMC a imposé une amende d’un montant de 60 000 €. Afin de déterminer le montant de la sanction, la CNMC a notamment pris en compte la durée du manquement, ainsi que l’atteinte à l’intégrité du marché. Le faible montant de l’amende semble pouvoir s’expliquer par le niveau du chiffre d’affaires de la société ainsi que des volumes concernés par les transactions en cause.

La CNMC a constaté que la société Rock Trading World s’est livrée à une manipulation du marché, consistant à émettre des ordres non authentiques et à exécuter des transactions impliquant de faibles volumes du côté de la vente du marché afin de donner des faux signaux d’une tendance à la baisse des prix, pour pouvoir acheter d’importants volumes de gaz, à des prix inférieurs, via des produits négociés sur le « Mercado Ibérico del Gas » (MIBGAS). L’enquête menée par la CNMC conclut que la société a inséré des offres de vente pour un faible volume alors que sa position réelle était à l’achat. Ce comportement avait pour but de négocier, par la suite, un volume élevé du côté de l’achat dans une situation de prix plus avantageuse. Ce comportement a été répété pendant quatre jours.

En outre, le 5 novembre 2018, Rock Trading World a également fixé le prix des produits infra-journaliers sur MIBGAS à un niveau artificiel.

Selon la CNMC, le comportement de la société Rock Trading World était susceptible d’envoyer des signaux faux ou trompeurs au marché quant au prix des produits énergétiques de gros du gaz concernés, ainsi que de fixer le prix de ces produits à un niveau artificiel, enfreignant ainsi les dispositions de l’article 5 de REMIT (interdiction des manipulations du marché).

Par ailleurs, l’infraction commise par la société Rock Trading est qualifiée de grave par la CNMC, conformément aux dispositions de l’article 110 u) de la loi espagnole 34/1998 du 7 octobre sur le secteur des hydrocarbures.

Consulter le communiqué de presse de la CNMC du 23 avril 2021 ainsi que la décision (en espagnol)  

ET AUSSI…

Publication du « Global Energy Review 2021 » de l’Agence internationale de l’énergie

Le 20 avril 2021, l’Agence internationale de l’énergie (AIE) a publié son rapport « Global Energy Review » pour l’année 2021. Ce rapport dresse un état lieux des différents secteurs de l’énergie et consacre un dossier thématique aux impacts économiques du Covid-19. L’AIE y lance un « avertissement sérieux », jugeant la reprise économique post-Covid « tout sauf durable pour notre climat ». En effet, elle estime que les émissions augmenteront de près de 5 % cette année et que la demande mondiale d’énergie devrait augmenter de 4,6%.

Consulter le « Global Energy Review 2021 » de l’Agence internationale de l’énergie (en anglais)


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